Éditorial

par Nick Barrett

15 septembre 2009

Depuis 2002 le pays a connu une série de mobilisations politiques et sociales remarquables qui participent à l’accumulation d’événements annonciateurs du potentiel de la recomposition du mouvement ouvrier :

Le vote pour Arlette et Olivier en 2002, la mobilisation de masse entre les deux tours, le rejet des propositions de la Fédération CGT de l’énergie lors du référendum à EDF, les grèves de 2003 (notamment le débat sur la nécessité d’une grève générale), le rassemblement du Larzac, les collectifs de défense des services publics, la campagne référendaire avec les différenciations explicites au sein du PS, de la CGT, la prise de position du PCF et la construction du mouvement des collectifs, et tout récemment la grève à la SNCM. Chacune de ces situations contenait le même paradoxe, la recherche d’une alternative politique, mais posée implicitement par le mouvement et non pas de façon consciente. Il est clair que nous devons tout faire pour que ces réseaux, équipes militantes, courants et individus puissent commencer à élaborer collectivement et consciemment une telle alternative. Cela ne sortira pas spontanément d’une lutte de masse, bien que celles-ci soient indispensables. Il s’agit bel et bien d’en favoriser la traduction en termes organisationnels, ce qui représenterait des pas en avant considérables dans la conscience politique et qui ouvrirait de nouvelles opportunités de radicalisation et de massification dans la construction d’une alternative politique.

La décision du 15e congrès de la LCR (30 oct-2 nov 2003) d’initier des forums pour une nouvelle force avec pour boussole des assises nationales en 2004 allait dans ce sens. Cette motion est exemplaire car elle traçait une direction claire, évitant une orientation exclusive sur les luttes sociales et en délimitant clairement les rapports au parlementarisme.

Nous pensions que l’alliance avec LO pour les élections de 2004 pouvait contribuer à la dynamique. Nous estimions qu’à ce moment-là une division électorale, sans autre alternative en vue, aurait été incompréhensible. Néanmoins, l’année 2004 n’a pas vu d’initiatives de la LCR impulsées centralement pour aller dans le sens du regroupement politique. Le bilan contrasté des élections de 2004 a certainement contribué aux hésitations.

Mais la campagne référendaire a reposé avec acuité le problème. Les élections allemandes ont confirmé, avec l’émergence spectaculaire du Linkspartei (alliance WASG, ‘Alternative électorale pour la justice sociale’ et l’ancien parti communiste de l’ex-RDA), que les phénomènes de recomposition se situent à une échelle européenne, tout comme les succès de Respect en Angleterre. Mais les exemples du PT de Lula au Brésil et de Rifondazione comunista en Italie montrent également qu’aucun regroupement ne se fait sans porter aussi les germes de futures différenciations.

À travers l’Europe, là où les révolutionnaires ont été centraux dans les initiatives pour une nouvelle force (Portugal, Angleterre, Ecosse), le centre de gravité des ces formations est bien plus à gauche que dans les cas où les initiatives reviennent à des directions réformistes. Les balbutiements de type candidature Bové ou les listes citoyennes du PCF aux élections européennes nous indiquent clairement que de toute manière nous risquons d’être confrontés à des tentatives de recomposition partielle. Dans les deux cas, elles prétendent exprimer la volonté d’une minorité importante de travailleurs de trouver une nouvelle maison politique à gauche. Notons aussi qu’après 1995 et 2002 les Verts et le PS ont connu un afflux important de nouvelles adhésions et cette année le PCF revendique 7 000 nouvelles cartes.

L’analyse des gauches a ici toute sa pertinence. En France c’est le début d’un pôle en rupture avec le social-libéralisme qui fait défaut. Le regroupement doit être envisagé comme la possibilité pour la classe ouvrière de se doter d’une nouvelle direction politique. En même temps, il posera des questions nouvelles de stratégie politique, notamment par rapport aux institutions, à la démocratie, au rôle de la classe ouvrière, et à l’attitude à adopter face au gouvernement. Nous avons tout à gagner à aborder ces questions au sein de la dynamique et à partir des expériences politiques communes. Cela nécessite bien entendu qu’une telle démarche active aille de pair avec le développement de la LCR, numériquement, politiquement (formation) et sur un profil élevé (développement de la diffusion d’un nouveau Rouge). Vu les mobilisations massives dans la jeunesse (en 2002, le mouvement lycéen et le vote jeune au référendum), la LCR doit tendre vers une politique volontariste en direction de la jeunesse. Le mouvement lycéen a montré qu’il y a une concurrence politique avec les courants réformistes pour influer sur la jeunesse.

L’orientation défendue par les camarades de la DN, intitulée Relever les défis de la situation, est celle qui permettra à la LCR de jouer au mieux son rôle. Par rapport aux élections, il paraît évident que le candidat le plus représentatif d’une telle dynamique unitaire serait Olivier Besancenot. Mais le débat ne se situe pas là. Il se situe d’une part dans le contenu et d’autre part sur la démarche à engager pour parvenir à une telle candidature, et a fortiori pour les législatives, aux candidatures unitaires. Notre engagement dès maintenant, avec la perspective clairement affichée d’aller au-delà de 2007 dans la construction d’une nouvelle force avec une activité extraparlementaire de masse, devrait guider nos choix qui joueront un rôle-clé. Cette perspective va évidemment de pair avec le refus d’une participation ou d’un soutien à un gouvernement qui ne serait pas en rupture avec le social-libéralisme.

Personne ne peut dire quels succès cette orientation va rencontrer dans l’immédiat, mais elle nous semble être celle qui donne la meilleure boussole à l’organisation pour construire sur ses succès (notamment la campagne du 29 mai) et assumer pleinement les nouvelles responsabilités que la situation politique impose.

C’est pour cela que la question du regroupement tient une place importante dans ce n°2 de la revue Que faire ?.


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