Racisme et lutte de classes

par Ambre Bragard

7 février 2011

L’idée est largement répandue que le racisme serait le fait de couches rétrogrades d’individus incapables de s’adapter aux nouvelles coordonnées d’un monde désormais mobile et cosmopolite. Leur peur irraisonnée de l’inconnu doublée de leur ignorance et de leur fermeture aux autres produiraient le racisme.

Si les politiques de tous bords affichent souvent de la complaisance à leur l’égard en agitant sans cesse les thèmes de l’insécurité et de l’immigration, ce ne serait que par calcul électoral égoïste. Flattant ainsi les bas instincts de tout un chacun, ils s’attireraient la sympathie d’une grande partie de la population prétendument raciste.

On renvoie ainsi le racisme à une pulsion naturelle de l’homme sévissant à toutes les époques et aux quatre coins du globe. Face à ce fléau, la tâche des antiracistes relèverait d’un travail d’éducation sans relâche, particulièrement en direction des populations les plus démunies culturellement, plus sensibles en cela aux idées racistes.

Mais le racisme est bien plus qu’un problème d’attitude individuelle, de rejet des uns vis à vis d’autres d’origines ou de cultures différentes. C’est un des traits caractéristiques des sociétés capitalistes avancées. Il existe de manière institutionnalisée à travers des discriminations au logement, à l’embauche, par le harcèlement de la police et de l’administration.

Pour les anticapitalistes, s’il en est ainsi, c’est parce que le racisme est avant tout un problème d’oppression lié à une structure sociale d’exploitation – le capitalisme. Il n’existe que par la domination de la classe capitaliste et ne peut être aboli que par la classe ouvrière unie. Car le racisme est un produit direct de l’émergence et du développement du système économique capitaliste.

D’où vient le racisme ?

Le racisme s’est développé dans une phase clef de l’expansion du capitalisme à l’échelle mondiale : la colonisation et l’instauration de plantations coloniales dans le Nouveau Monde au XVIIe et au XVIIIe siècle reposant sur le travail contraint d’esclaves importés d’Afrique.

Non qu’il n’existait pas de pratiques discriminatoires, notamment religieuses, dans les systèmes précapitalistes mais elles ne correspondaient pas à une vision racialisée du monde et la plupart du temps la conversion des opprimés permettait d’y échapper. C’est bien le capitalisme qui universalisa pour la première fois les préjugés raciaux.

On a coutume de dire que l’esclavage fut le produit d’un racisme déjà enraciné dans la société occidentale. Or c’est l’inverse qui est vrai, les théories racistes firent leur apparition avec la nécessité de justifier l’esclavage. Auparavant ce besoin n’avait pas lieu d’être, pas même dans les sociétés esclavagistes grecques ou romaines. En effet, dans les sociétés hiérarchiques précédentes, la population était divisée en groupes légalement inégaux – l’esclavage n’étant que l’une des formes de ces statuts juridiques inégaux – mais ces inégalités n’avaient besoin d’aucune justification particulière autre que leur utilité sociale. Les esclaves en Grèce pouvaient être tout aussi grecs que leurs maîtres. Il était donc directement question d’inégalités de classes et non de races. Il en va autrement avec le capitalisme puisque son mode de production repose sur l’exploitation d’une main d’œuvre salariée libre. Le capitaliste et le travailleur sont désormais légalement égaux sur le marché du travail. Le travailleur est libre de ne pas vendre sa force de travail, mais comme il est aussi libre de toute propriété, il est poussé à se monnayer pour survivre. Dans un tel système où l’égalité formelle masque l’inégalité réelle, le recours au travail forcé est une anomalie qu’il faut pouvoir justifier.L’énorme besoin en main-d’œuvre que créait l’établissement des plantations coloniales pour satisfaire en matières premières et en produits de consommation le marché mondial florissant impliquait d’importer massivement des travailleurs sur le continent américain. Cette réorganisation monumentale du travail à l’échelle planétaire impliquait à son tour le recours au travail servile.Au début, ce besoin fut satisfait par des serviteurs blancs sous contrat venus d’Europe en échange du prix de leur voyage, de leur liberté, etc. Leur servitude était quasi totale mais ne pouvait être perpétuelle en raison des conséquences que cela risquerait de produire sur les travailleurs européens si la situation de leurs frères leur était révélée. En plus de tarir la source d’immigration nécessaire, cela risquerait sans nul doute de créer des désordres sociaux en révélant au grand jour l’exploitation cachée derrière « l’égalité » promise par le capitalisme.

Le besoin intarissable en nouvelle force de travail et le problème d’instabilité qu’impliquait la fin de la servitude de la main-d’œuvre européenne conduisirent les capitalistes de l’époque à recourir à l’esclavage des africains.

Mais le besoin de justifier la contradiction manifeste que représentait la dépendance du capitalisme vis-à-vis du travail servile restait entier. En créant une catégorie d’humains qui ne méritait pas l’égalité, le racisme put résoudre cette contradiction. Il fut le seul artifice permettant de refuser aux uns ce que le capitalisme promettait aux autres.

Le racisme a également été nécessité par l’impérialisme. La concurrence entre les nations européennes dans le contrôle des richesses et des matières premières nécessaires à leur supériorité économique mit les classes dirigeantes en conflits directs avec les populations « indigènes ». Une autre justification devint nécessaire. La spoliation des richesses fut masquée par l’idée du « fardeau de l’homme blanc », dont la mission consistait à amener la « civilisation » à des peuples primitifs et barbares.

Le racisme dans le capitalisme contemporain

Avec la fin de l’esclavage et l’effondrement des empires coloniaux, on pourrait croire que le racisme n’a plus de raison d’être. Les bases matérielles qui justifiaient son développement ayant disparu, le racisme contemporain ne serait qu’un vestige du passé. Ce serait le produit de plusieurs siècles de formatage des esprits qui continuerait à hanter les corps et qu’il faudrait maintenant s’atteler à déconstruire. En bref le racisme serait une passion populaire mal digérée.

Mais le racisme d’aujourd’hui n’est pas seulement un fantôme du passé, ses bases matérielles sont sans cesse régénérées par le capitalisme contemporain. Sans cela on aurait beaucoup de peine à expliquer les politiques racistes menées par l’ensemble des gouvernements européens depuis le début des années 80. Le seul opportunisme n’y suffirait pas.

1.Les raisons économiques

Le racisme moderne se manifeste encore une fois au plus près de l’organisation de la production. La tendance à la circulation du capital vers les secteurs à forts taux de profits entraîne un besoin croissant en force de travail qui pousse les classes dirigeantes à s’approvisionner en main-d’œuvre au delà des frontières de l’État à partir des années 50. Mais ce besoin de circulation de la force de travail se heurte au rapport de forces entre les classes. La nécessité pour les capitalistes de faire circuler la force de travail – immigration pour alimenter le marché en travailleurs mais surtout migration des travailleurs eux-mêmes entre différents secteurs économiques selon les besoin fluctuants du capital – s’oppose frontalement aux revendications de droits du travail et de sécurité sociale des travailleurs. Le recours au travail immigré permet de résoudre partiellement cet antagonisme. La main-d’œuvre immigrée étant dans l’incapacité de refuser des mauvaises condition de travail (bas salaires, précarité, tâches pénibles et dégradantes, etc.), elle contribue à la flexibilité de l’offre de travail dont le capital a besoin tout en préservant en apparence les travailleurs nationaux.

Le recours au travail immigré s’est donc imposé comme un des traits structurel du capitalisme à la fois en termes de besoin quantitatif mais aussi comme variable d’ajustement.

Mais pour que cela soit possible, il faut nécessairement que le traitement discriminant et la place spécifique occupée par les immigrés dans l’organisation de la production paraissent naturels aux yeux de la majorité des travailleurs. C’est l’une des fonctions du racisme que de faire accepter à la classe ouvrière ce traitement inégal envers l’une de ses composantes.

2. Les raisons politiques

En plus de contribuer à la flexibilité de la force de travail, le recours à la main-d’œuvre immigrée rend donc possible la division de la classe ouvrière selon des démarcations raciales ; et ce d’autant plus facilement qu’elles correspondent de surcroît à la division sociale du travail (ouvriers spécialisés immigrés/ouvriers professionnels nationaux). De là, une autre fonction essentielle endossée par le racisme. Il ne s’agit plus seulement de justifier idéologiquement un besoin économique purement matériel, mais il s’agit plus directement d’un enjeu politique et idéologique de premier plan dans la construction du rapport de force entre les classes : viser, selon les termes du sociologue Saïd Bouamama, à « diviser ceux qui devraient être unis » – travailleurs nationaux et immigrés – et à « unir ceux qui devraient être divisés » – travailleurs nationaux et patrons.

En substituant le « nous les travailleurs, eux les patrons » par un « nous les nationaux, eux les immigrés », le racisme permet de diviser la classe ouvrière, et donc d’affaiblir considérablement ses résistances, mais il permet aussi de souder une partie des travailleurs derrière les classes dirigeantes. L’antagonisme qu’il génère est ainsi le secret de l’impuissance de la classe ouvrière en même temps qu’il est aussi celui de la puissance persistante des capitalistes.

Ce phénomène n’est pas nouveau, Marx lui-même pointait déjà cette fonction du racisme dans sa remarquable analyse sur la situation du prolétariat en Angleterre en 1870 (Cf. encadré), mais elle est devenue peu à peu sa principale raison d’être.

Le racisme dans notre camp

Dans cet extrait Marx esquisse également deux conditions fondamentales à l’existence du racisme dans notre camp. D’abord, le fait que les travailleurs soient en concurrence les uns avec les autres sur le marché du travail favorise le développement du racisme ; le travailleur immigré, plus prisé car moins cher et moins qualifié, est souvent vécu par les travailleurs « nationaux » comme un concurrent qui abaisse leur niveau de vie. Ensuite, le racisme ne pourrait pas se développer dans la classe ouvrière si les travailleurs blancs n’y trouvaient pas un intérêt, ne serait-ce qu’imaginaire. Celui-ci relève de l’attrait idéologique. Bien que « travailleurs immigrés » et « travailleurs nationaux » constituent deux groupes aux intérêts identiques, ils se retrouvent divisés de sorte que les salaires des deux peuvent être maintenus vers le bas. Le travailleur blanc qui y consent reçoit en échange une compensation psychologique de l’ordre du réconfort de se croire membre du groupe dominant face au groupe dominé. Uni de cette façon aux capitalistes, il devient l’instrument de leur oppression sur une partie de sa propre classe, renforçant ainsi leur domination sur lui-même.

En temps de crise et en l’absence de réponse de classe à une situation économique et sociale dégradée, le racisme peut alors s’insinuer dans nos rangs à une vitesse foudroyante. Bien que les intérêts des travailleurs immigrés soient les mêmes que ceux de l’ensemble de la classe ouvrière, bien qu’en consentant à leur oppression les travailleurs blancs condamnent eux-mêmes l’ensemble de leur classe au renforcement de l’exploitation capitaliste, l’idéologie raciste voile cet état de fait en masquant et en renversant cette communauté d’intérêt. Pourtant c’est bien dans cette réalité que réside le secret de la puissance de la classe ouvrière car cet intérêt commun une fois parvenu à la conscience de la classe est le ciment de son unité, élément indispensable pour qu’elle puisse commencer à riposter sérieusement contre les préjugés racistes et contre le capitalisme qui les génère. C’est pourquoi le niveau de la lutte de classe est essentiel dans l’intensité du racisme.Un exemple, issu de l’histoire sociale récente de France, de la rapidité avec laquelle le racisme peut diviser la classe, peut être celui de la conclusion dramatique de la grève de l’usine automobile de Talbot Poissy en région parisienne en 1984. Les ouvriers spécialisés immigrés en grève contre les licenciements se sont vus évacués de l’usine qu’ils occupaient par la police sous les applaudissement complices des ouvriers nationaux, chantant La Marseillaise et scandant « Les arabes au four ! À la Seine ! »

Pourtant, deux ans plus tôt, lors du printemps de la dignité qui enflamma l’ensemble du secteur automobile, la « révolte des esclaves » portée par les OS immigrés dans l’indifférence des ouvriers professionnels majoritairement blancs gagnait des avancées considérables pour l’ensemble des ouvriers de la branche : augmentations de salaire, liberté syndicale, etc.Les travailleurs immigrés faisaient alors la démonstration pratique de la communauté d’intérêts qui les unit à l’ensemble de la classe ouvrière.

Le racisme aujourd’hui

L’offensive du gouvernement sur le front du racisme, de la répression et du nationalisme n’est pas une simple stratégie de diversion ou une stratégie électorale comme on l’entend souvent. Même si l’agenda de cet été n’est pas une pure coïncidence – le fait que l’escalade raciste du gouvernement ait lieu au moment même où éclate l’affaire Woerth-Bettencourt – ou si la droite elle-même prétend vampiriser les voix du FN.

Dire que le racisme d’État relèverait de prétentions électoralistes, c’est reconduire l’idée que le racisme vient d’en bas, qu’il relèverait d’une passion populaire envers laquelle l’État se rendrait coupable de complaisance. Or c’est l’inverse qui se produit, le racisme vient d’en haut, c’est l’État qui entretient le racisme populaire (et le FN) pour légitimer ses politiques.

Le développement du racisme, de la répression et du nationalisme est en fait bien plus central dans la politique des classes dirigeantes aujourd’hui. Leur indissociabilité constitue la face visible de l’évolution la plus récente de la fonction politique du racisme.

Le sociologue Loïc Wacquant expliquait déjà au début des années 2000 que le libéralisme ne va pas de pair avec la disparition de l’État, mais qu’au contraire on assiste à son renforcement. A mesure que l’État retire son bras social (à grands coups de privatisations, de casse du droit du travail et des protections sociales), il est obligé d’avancer son bras répressif pour contenir les désordres liés à l’insécurité sociale qu’il génère. De là, la nécessité d’une part de mettre en place une multitude de lois sécuritaires et d’autres part le développement du racisme institutionnel depuis la fin des années 80 – l’amalgame « étranger = insécurité » et les politiques restrictives de l’immigration portés à différents niveaux par tous les partis institutionnels. Le racisme a le triple avantage pour la classe dirigeante 1) de fournir un bouc émissaire au sentiment d’insécurité sociale due au renforcement de l’exploitation et à la croissance de la pauvreté et du chômage – « si je n’ai pas de travail, c’est la faute de mon voisin immigré », « si on doit réformer le système, c’est la faute de ces profiteurs » etc. , 2) de diviser les travailleurs entre eux et donc de limiter leurs résistances face à cette situation, et 3) de justifier les politiques sécuritaires mises en place pour mater ces mêmes résistances.

Ces phénomènes vont s’accélérer avec la crise [1].

La concurrence entre les capitalistes étant de plus en plus grande sur le marché mondial, les capitaux doivent se lier plus étroitement à leur État national pour défendre leurs intérêts dans cette guerre sans merci qu’ils se livrent entre eux, comme le démontre l’épisode du sauvetage des banques orchestré par les États au moment aigu de la crise. Ce phénomène pousse à un renforcement plus radical encore de l’État : non plus essentiellement sur le plan répressif mais aussi sur les plans idéologique et économique, l’illusion de sa disparition dans ce domaine éclatant au grand jour lorsqu’il vole au secours des banques pour renflouer leurs caisses.

Dans ce contexte deux tendances profondes sont à l’œuvre et vont être amenées à se développer :

  • une militarisation croissante de la société – aussi bien pour mater les résistances à l’intérieur que pour se faire une place à l’extérieur,
  • et idéologiquement une tentative accrue de souder autour de la classe dirigeante une fraction des couches populaires et des catégories intermédiaires – afin de construire l’unité nationale face aux concurrents internationaux et de faire avaler la pilule du prix de la crise payé par les peuples.

Le développement du racisme, et plus particulièrement de l’islamophobie, est central dans la mise en place de ce projet puisqu’il articule la désignation de l’étranger/danger et la revendication d’une identité nationale en même temps qu’il permet de construire un ennemi intérieur (Rroms, musulmans, jeunes des banlieues, etc.) à l’image d’ennemis extérieurs justifiant les guerres.

Comment lutter contre le racisme ?

Le racisme aujourd’hui n’est pas avant tout un racisme d’en bas mais d’abord un racisme d’en haut, promu par les classes dirigeantes, mais la crise développe des effets contradictoires dans notre camp. L’insécurité sociale suscite de la colère comme de la peur [2].

La peur conduit à la haine et au renoncement sur lesquels les courants les plus réactionnaires peuvent se développer comme en témoigne la remontée des courants d’extrême droite partout en Europe. À partir de la colère ce sont les mobilisations qui peuvent se construire. Or le niveau de la lutte des classes est déterminant pour faire reculer le racisme.

De ce côté là, la France n’est pas en reste comme l’a démontré la séquence sociale ouverte à la rentrée avec les manifestations antiracistes du 4 septembre dans tout le pays et avec la mobilisation pour les retraites de cet automne qui fit descendre 3 millions de personnes dans la rue chaque semaine. Mais déjà, avant cela, le formidable mouvement des travailleurs sans-papiers qui a occupé l’actualité sociale pendant plus d’un an, a permis de faire reculer le racisme à son échelle en révélant la dimension de classe de leur combat.

Pour lutter contre le racisme, il s’agit donc d’abord de s’impliquer dans les diverses batailles autour des différents aspects du racisme : luttes antifascistes, soutien aux sans-papiers, luttes contre les violences policières, contre les contrôles de l’immigration ou contre les attaques du droit d’asile. Mais ce n’est pas suffisant, pour mener une lutte efficace contre le racisme il est nécessaire d’en comprendre la nature et les causes.

1. Du point de vue de la nature du racisme

Au fil du temps, le racisme a connu un changement de nature qui n’a rien d’anodin ; le racisme biologique s’est mué en un racisme culturel. L’inégalité des races – qui n’est plus respectable scientifiquement et moralement depuis la seconde guerre mondiale – s’est peu à peu changée en inégalité des cultures. Mais là encore l’ethnicité ou la culture sont conçues comme des destins auxquels ceux qui en sont issus ne peuvent échapper qu’au prix d’une intégration/désintégration qui les ampute définitivement d’une part d’eux-mêmes (et encore sans aucune garantie que cela mette réellement fin à la stigmatisation qu’ils subissent). Ne pas avoir cette analyse conduit à apporter de mauvaises réponses. Car ce racisme régénéré s’exprimant aujourd’hui au nom de la lutte contre le communautarisme, de l’universalité de la loi et de l’égalité des sexes est soutenu ardemment par une bonne partie de l’intelligentsia, y compris de « gauche ». Derrière cet apparat plus respectable il s’agit toujours de stigmatiser des individus.

2. Du point de vue des causes du racisme

Le développement du racisme dans notre camp est une solution imaginaire à un problème bien réel, celui de l’exploitation, de la pauvreté, du chômage, etc. La lutte contre le racisme doit par conséquent être liée à une agitation permanente autour des questions sociales.En outre, le racisme est une oppression engendrée par un système d’exploitation – le capitalisme. Mais s’il faut nécessairement renverser le système pour éradiquer le racisme, la classe ouvrière ne peut y parvenir qu’unifiée. Cela ne signifie donc pas remettre à plus tard le combat antiraciste, bien au contraire, car celui-ci est primordial. La lutte contre le racisme est le chemin par lequel la classe ouvrière s’unifie et prend conscience d’elle-même dans son combat contre la classe dirigeante.

Les anticapitalistes doivent par conséquent construire un parti composé de travailleurs de toutes origines convaincus par cette idée et travaillant sans relâche à l’unification des différentes composantes de la classe ouvrière.

En conclusion

Dans la période qui s’annonce, le racisme va devenir de plus en plus central car il s’intègre dans le projet global de la classe dirigeante. Le mouvement global de résistance va être confronté au problème, il devra être en mesure d’apporter une réponse de classe cohérente face au racisme s’il veut pouvoir se renforcer, s’unir et se coordonner face aux attaques de la classe dirigeante (notamment sur le plan économique).

De là une tâche urgente se pose à lui : construire un mouvement antiraciste de masse, implanté dans les quartiers populaires et sur les lieux de travail, qui ne fasse aucune concession aux attaques de la classe dirigeante. Pour cela il devra tenir compte des derniers développements du racisme et, en conséquence, de la nécessité d’articuler lutte contre le racisme, lutte anti-sécuritaire et solidarité avec les peuples opprimés pour être capable d’entraîner plus largement contre les offensives du pouvoir sur ces fronts.


En encadré :

L’Angleterre a maintenant une classe ouvrière scindée en deux camps ennemis : prolétaires anglais et prolétaires irlandais. L’ouvrier anglais ordinaire déteste l’ouvrier irlandais comme un concurrent qui abaisse son niveau de vie. Il se sent à son égard membre d’une nation dominatrice, devient, de ce fait, un instrument de ses aristocrates et capitalistes contre l’Irlande et consolide ainsi leur pouvoir sur lui-même. Des préjugés religieux, sociaux et nationaux le dresse contre l’ouvrier irlandais. Il se conduit envers lui à peu près comme les « blancs pauvres » envers les noirs dans les anciens États esclavagistes de l’Union Américaine. L’Irlandais lui rend largement la pareille. Il voit en lui à la fois le complice et l’instrument aveugle de la domination anglaise en Irlande. Cet antagonisme est entretenu artificiellement et attisé par la presse, les sermons, les revues humoristiques, brefs par tous les moyens dont disposent les classes au pouvoir. Cet antagonisme constitue le secret de l’impuissance de la classe ouvrière anglaise, en dépit de sa bonne organisation. C’est aussi le secret de la puissance persistante de la classe capitaliste, qui s’en rend parfaitement consciente. [3]


Pour aller plus loin :

Notes

[1Cf. Denis Godard, «  Et s’il ne s’agissait pas de religion  ?  », éditorial de la revue Que Faire  ?NF n°3.

[2Cf. Vanina Guidicelli, «  La guerre de classe qui vient  », éditorial de la revue Que Faire  ?NF n°4.

[3Karl Marx, «  Lettre à Siegfried Meyer et August Vogt, 9 avril 1870  », in Marx-Engels, Correspondances.

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