NPA : Un espace à reconstruire

Réponse à Alex Callinicos

par Denis Godard

6 août 2009

Le NPA est un développement politique excitant parce qu’il répond à une nécessité émergeant du processus des luttes de ces dernières années en France. Il ouvre aussi la perspective pour les marxistes révolutionnaires, qui ont été au cœur de son lancement, d’intervenir activement dans une période d’accélération de la crise globale du capitalisme à une échelle inédite dans un pays capitaliste avancé avant une phase révolutionnaire...

C’est ce qui fait toute l’importance du débat entre François Sabado et Alex Callinicos dont la tonalité ouverte n’est pas la moindre qualité dans une période où les révolutionnaires ont la possibilité accrue d’apprendre de l’expérience concrète et la responsabilité de se défaire du poids des sectarismes.

La base commune sur laquelle raisonnent Sabado et Callinicos pour discuter des nouvelles forces dans leurs échanges est l’idée que la crise des directions traditionnelles du mouvement ouvrier a ouvert un espace « à gauche de la gauche réformiste », espace qu’il s’agit d’occuper. C’est ce qui explique que l’essentiel de leurs divergences tourne autour de la question des délimitations programmatiques, celles des nouvelles forces elles-mêmes et celles dont se dotent les marxistes révolutionnaires en leur sein.

Pour dire les choses un peu rapidement Sabado argumente, dans la lignée de ce qui a été obtenu dans les principes fondateurs du NPA, pour la nécessité de délimitations programmatiques plus précises (dans un sens révolutionnaire) que Callinicos pour les partis à construire. Cela l’amène assez logiquement à repousser l’idée de toute forme de délimitations pour les marxistes au sein de la nouvelle force.

Dans sa dernière réponse Callinicos en arrive à donner acte à Sabado en ce qui concerne les délimitations du NPA, anticapitalistes et révolutionnaires, pour des raisons spécifiques à la France tout en maintenant la nécessité d’une approche plus souple pour d’autres situations.
Il n’y a aucun doute à la lecture de Callinicos que le plus important, selon lui, pour armer le renouveau politique et définir des stratégies et tactiques appropriées est la compréhension du réformisme c’est-à-dire des contradictions qui parcourent la conscience de classe et de la dynamique de leur évolution. Je partage cette préoccupation.

Cependant les débats sur le Nouveau Parti Anticapitaliste ne devraient pas porter d’abord sur la nature plus ou moins précise de ses délimitations mais sur sa capacité à organiser la direction plus ou moins informelle qui émerge du processus des luttes de manière à lui permettre d’influer voire de diriger le mouvement et le recomposer sur une base de classe. Or les délimitations révolutionnaires revendiquées pour ce type de parti ne sont pas seulement une illusion, elles affaiblissent la cohérence du courant révolutionnaire et deviennent un obstacle pour construire la stratégie anticapitaliste commune dont ce parti a besoin.

Une nouvelle situation

Il me semble que les limites du débat entre Sabado et Callinicos proviennent du fait que l’espace dont ils parlent n’est pas seulement un espace « à occuper » parce que cet espace n’est pas seulement de nature « partidaire » [1] ou politique au sens étroit du terme. Il est idéologique, social et politique. C’est un espace qu’il faut en grande partie reconstruire. Les délimitations du NPA, comme des forces à construire ailleurs, ne peuvent donc être déterminées, à la différence de partis révolutionnaires, par l’objectif de la prise du pouvoir mais, de manière beaucoup plus souple et évolutive à partir d’une stratégie de reconstruction de cet espace.

La conjonction, selon des temporalités différentes, des transformations subies par le mode de production capitaliste et donc de la structure de la classe ouvrière, de la crise économique et du retour des luttes crée une situation politique historiquement nouvelle que Stathis Kouvélakis caractérise comme une crise d’hégémonie prolongée. « Du fait même de son caractère fondamentalement destructeur du compromis social antérieur le néolibéralisme n’a pu émerger et l’emporter que sur fond de défaites et de recul des classes dominées. Il ne l’a emporté que par défaut, en l’absence de perspective alternative, sans être en mesure d’entraîner une adhésion populaire majoritaire. En termes gramsciens, il s’agit d’une domination sans hégémonie. » [2]

Une des composantes de cette crise d’hégémonie est la crise des directions traditionnelles du mouvement ouvrier. Les raisons n’en sont pas seulement dans leur « droitisation » idéologique. Les transformations de la classe ouvrière ont aussi largement affaibli et parfois détruit les bastions sur lesquels elles s’appuyaient tandis que de nouveaux secteurs se sont développés. C’est toute la structuration du « monde ouvrier » qui est en crise (affaiblissement de toutes les organisations traditionnelles de la classe mais aussi de ses références, de sa « culture ») et, au-delà, l’influence que le mouvement ouvrier pouvait avoir sur toute la société.

Cette crise du mouvement ouvrier a certes affaibli les capacités de résistance des travailleurs à l’offensive néo-libérale. Kouvélakis a raison de souligner en ce sens qu’elle en est une condition autant qu’un effet. Mais nous devons aussi garder à l’esprit que la domination des directions traditionnelles du mouvement ouvrier, le type de structuration - bureaucratique - de celui-ci et sa culture étaient une condition de l’hégémonie dominante dans la période précédente. De ce point de vue il est juste de parler d’ouverture d’un espace. [3]

Actualité d’un paradoxe

Lors d’une interview avec Tony Cliff en 1970, un journaliste de L’Idiot International s’étonnait que Cliff parle plus de la lutte à mener au sein de la classe des travailleurs que de la lutte contre la classe dirigeante. La domination d’une minorité de capitalistes n’est effectivement possible que parce qu’en général l’énorme majorité des travailleurs « incorpore » cette domination dans ses idées et ses pratiques.

Le réformisme n’est pas une simple « manipulation des consciences ». Il est la meilleure expression de ce que Gramsci appelle une « conscience contradictoire » chez les travailleurs entre l’acceptation des idées dominantes et l’expression de leurs intérêts réels qui entrent en contradiction avec ces idées dominantes.

C’est dans l’expérience, même limitée, de la résistance à l’exploitation ou plus généralement d’une résistance à l’injustice du « monde tel qu’il est », que se développe la base d’une remise en cause des idées dominantes. Mais cette remise en cause est toujours partielle et hétérogène à l’échelle de la classe.

Formulons le paradoxe : si c’est dans sa lutte concrète contre la classe dirigeante que la classe ouvrière peut se construire en tant que classe (consciente et organisée), cela nécessite aussi un combat interne à la classe ne serait-ce que pour garantir la possibilité même de la lutte.

Dans Le Manifeste communiste, Marx a formulé la réponse largement théorique à ce paradoxe en définissant le rôle des communistes. Les communistes ne doivent jamais se séparer de la classe dominée, ils doivent toujours défendre les intérêts du mouvement en général. En même temps ils doivent être la fraction la plus résolue des « partis ouvriers » et avoir l’avantage « théorique » sur « le reste du prolétariat [...] d’une intelligence claire des conditions, de la marche et des fins générales du mouvement prolétarien ».

Retour sur le front unique

La stratégie du front unique a été la réponse pratique des partis de la IIIe Internationale à ce paradoxe dans les années 1920 en articulant l’appel à l’unité d’action du mouvement ouvrier au travers de l’unité de ses partis, réformistes et révolutionnaires, avec la lutte entre ces partis au sein du mouvement unitaire.

La IIIe Internationale était née en 1919 d’une scission des partis de la IIe Internationale pour créer des partis révolutionnaires. Mais la capacité, dans les pays développés, des partis réformistes de conserver le soutien, au moins passif, de fractions conséquentes de la classe ouvrière, avait conduit à l’échec de la première vague révolutionnaire notamment en Italie et en Allemagne.

Le front unique était une stratégie destinée à convaincre la majorité des travailleurs en les entraînant dans l’action aux côtés des révolutionnaires parce que les révolutionnaires se montreraient dans l’action « la fraction la plus résolue des partis ouvriers » et qu’ils avaient « théoriquement l’intelligence des conditions, de la marche et des fins du mouvement ».

Cette stratégie a été élaborée dans une situation historique particulière dont les caractéristiques peuvent être résumées succinctement ainsi : un mouvement ouvrier organisé puissant (malgré la guerre), une culture marxiste dominante au sein de la gauche, des partis réformistes et révolutionnaires forts se disputant la direction du mouvement ouvrier.

Dans cette situation l’unité d’action de la classe était assurée via l’unité de ses organisations (et en premier lieu des partis). Détacher les travailleurs du réformisme, c’était essentiellement réussir à les détacher du parti réformiste. [4]

Ce que nous décrivons comme une crise d’hégémonie prolongée signifie que la stratégie de front unique se pose aujourd’hui dans des conditions historiques radicalement différentes : un nouveau mouvement ouvrier largement déstructuré et des directions traditionnelles qui n’ont que des liens distendus avec la classe ouvrière. Et cela dans une société où les idées de classe sont seulement en train de retrouver une audience.

Front unique élargi

C’est sur la base du modèle « classique » que Sabado refuse d’aborder le NPA comme cadre de front unique. Parce qu’il raisonne dans le cadre de ce modèle cela l’amène à penser le NPA dans les catégories d’un combat politique où le NPA jouerait le rôle du parti révolutionnaire en lutte contre le parti réformiste.

La notion de « front unique d’un type particulier » à laquelle se réfère Callinicos pour caractériser les nouvelles forces à construire cherche à répondre à une situation qui exige de dépasser le modèle historique. Cela reste cependant insuffisant car cela n’est pensé que comme une variation de ce modèle. C’est ce qui amène Callinicos à finalement accepter que le NPA ne peut correspondre à cette variation.

Gramsci, dont les travaux dans les prisons fascistes visaient à essayer de comprendre l’échec de la vague révolutionnaire des années 1920, avait repris la notion du front unique en l’élargissant sur la base d’une analyse de la structure plus complexe des sociétés capitalistes avancées. Il en tirait une vision élargie du front unique. Comme l’explique Daniel Bensaïd, il lui fixe « comme objectif la conquête de l’hégémonie politique et culturelle ». Il en déduit, d’une manière très léniniste, qu’une situation révolutionnaire « a pour enjeu la résolution d’une crise généralisée des rapports réciproques entre toutes les composantes de la société » qui ne peut se réduire à « l’affrontement corporatif entre deux classes antagoniques ». [5]

Cette notion élargie du front unique fait du modèle « classique » une forme adaptée à certaines conditions historiques, celles où la réalité du mouvement ouvrier et de son influence sur la société faisait de la lutte de direction la question centrale pour « résoudre cette crise généralisée ». [6]

Mais l’objectif fondamental du front unique n’est pas l’unité d’action entre des partis. Son objectif est de mettre en mouvement une majorité de la société dans une confrontation à différents niveaux avec la classe dirigeante, d’organiser la classe ouvrière comme force motrice de ce mouvement et de la gagner à une direction révolutionnaire. [7]

Conception stratégique du NPA

C’est cette problématique qui nous amène à préciser notre conception du NPA. Le moment central actuel de la lutte des classes en France est dans la reconstruction du mouvement ouvrier et de sa capacité à entraîner « toutes les sections opprimées », à construire ce que certains appellent une « contre-hégémonie ».

Dans une période où le processus de développement des luttes a déjà commencé à faire émerger des directions potentielles dans de nombreux fronts de la lutte contre le système, le NPA doit viser à regrouper celles-ci, les coordonner et les doter d’une stratégie de confrontation avec la classe dirigeante. Ce faisant, s’appuyant sur la dynamique propulsive des luttes, il ne permettra pas seulement à celles-ci de dépasser la paralysie induite par la domination actuelle et la politique des directions traditionnelles, il sera l’élément central pour reconstruire le mouvement ouvrier. C’est cet objectif qui détermine les délimitations du NPA, comme parti anticapitaliste et parti de classe.

Disons d’abord que cela n’est pas acquis d’avance et ne peut se résoudre par des proclamations de principes fondateurs. L’importance mise sur des délimitations précises pour le NPA a favorisé dans le processus de fondation les propagandistes les plus aguerris au détriment des activistes. Et parmi ces propagandistes les éléments les plus révolutionnaristes hors de l’ex-LCR et en son sein ont trouvé un écho parmi les tendances gauchistes « saines » des secteurs de la société nouvellement radicalisés par le mouvement [8]. Mais les proclamations « révolutionnaires » du NPA ne devraient pas être un argument pour acter sa nature révolutionnaire. De nombreux militants et militantes se reposent les questions qui semblaient « réglées » dans les principes fondateurs au moment où celles-ci sont soulevées par la réalité. C’est d’ailleurs ce qui fait tout le potentiel du NPA.

Pourtant la conséquence de ce processus fondateur dominé par le propagandisme est simple : si le NPA a gagné un début d’implantation dans des secteurs plus populaires et ouvriers il reste cependant relativement faible parmi les sections organisées du mouvement notamment dans les syndicats mais aussi dans les associations de quartier. Et ce qui rend plus facile de gagner au moins superficiellement sur des délimitations programmatiques révolutionnaires (dans des sections nouvellement radicalisées et peu liées au mouvement ouvrier organisé) rend à l’opposé plus compliqué de construire réellement sur des bases de classe.

Il est évident que l’implication dans un parti est un processus plus réfléchi et souvent plus lent pour des militant-e-s qui ont un milieu voire des responsabilités. Mais l’importance de gagner ce type de militant-e-s au NPA devrait être un objectif, ce que rend actuellement plus difficile le profil propagandiste dominant.

Plus largement ce profil, qui se focalise de manière abstraite sur les divergences au sein de l’anticapitalisme, devient rapidement un obstacle à la mise en place d’une stratégie susceptible de guider l’ensemble du NPA, lui donnant une cohérence malgré les divergences et le faisant apparaître comme une force utile pour tous ceux et celles qui veulent agir pour surmonter les limites actuelles du mouvement.

Quelle stratégie ?

L’audience pour une telle stratégie est créée par le développement de la crise du capitalisme et par les questions soulevées par les luttes. Quand se développe la défiance dans les institutions et dans les directions du mouvement ouvrier, tandis que les luttes existent, une perspective alternative concrète doit se développer pour éviter que la combativité ne se retourne en passivité. L’appel fétichisé à la grève générale peut se révéler un outil à double tranchant. Si cet appel peut faire sens lorsque les directions syndicales appellent sous la pression à une journée nationale de grèves et de manifestations, il peut se transformer en profond pessimisme quand ces mêmes directions paralysent l’action sans qu’une direction alternative puisse s’y substituer sur une base plus combative. Cela ne peut que redonner du poids aux illusions électoralistes (et donc au réformisme) qui apparaissent alors comme la seule manière de poser la question du pouvoir.

Il est évident que le NPA devrait élaborer une politique à défendre dans tous les fronts où il est impliqué visant à construire et développer le mouvement sur des bases à la fois larges et combatives. Mais cela devrait être combiné à l’élaboration d’une stratégie qui serait l’équivalent de ce que la tradition trotskyste a appelé stratégie transitoire [9] en avançant des réformes de structure anticapitalistes. Le NPA devrait être connu comme l’organisation proposant, argumentant, initiant parfois, en fonction des situations concrètes, les formes de ce qui était appelé classiquement le contrôle ouvrier, argumentant pour des formes d’organisation des travailleurs dans les entreprises visant des formes plus ou moins développées de contrôle, des formes d’organisation unissant travailleurs et usagers des services publics dans les quartiers, etc.
Comme l’illustre l’étude écrite par Donny Gluckstein sur les conseils ouvriers, ces expériences exigent et permettent la coopération entre une couche de « dirigeants locaux de base » dans les entreprises, souvent connus pour leur opposition aux directions syndicales, dotés d’une légitimité parmi les travailleurs mais souvent limités par l’habitude de devoir constamment traiter des revendications immédiates et des militants politiques dotés d’une vision plus globale mais souvent dépourvus de légitimité et d’implantation parmi les travailleurs [10].

Rôle des révolutionnaires

Il n’y a non seulement pas de contradiction entre stratégie anticapitaliste et stratégie révolutionnaire mais la première doit être conçue comme un élément de la seconde. Des divergences sur la perspective révolutionnaire, notamment sur la nécessité de renverser l’État ou sur le rôle de la violence, ne sont pas des obstacles pour partager une stratégie anticapitaliste (c’était d’ailleurs la base de l’élaboration des revendications transitoires).
Mais les marxistes révolutionnaires doivent démontrer que la clarté sur la perspective révolutionnaire est ce qui aide à développer une stratégie anticapitaliste conséquente.
De plus, le développement de contre-pouvoirs, soient-ils temporaires, soulèvera, de manière cette fois concrète, la question de l’ampleur de la confrontation nécessaire avec le pouvoir existant et ses institutions et des modalités de cette confrontation.

On revient là, en ce qui concerne le rôle des révolutionnaires au sein du NPA, au rôle que Marx attribuait aux communistes : les plus résolus dans l’élaboration et le développement d’une stratégie anticapitaliste pour le NPA et les plus conscients des conditions, de la marche et des fins de cette stratégie.

Cela exclut de fait la construction d’une fraction révolutionnaire au sein du NPA basée sur son autonomie d’action car le développement du NPA est actuellement une condition à la possibilité et au développement d’une stratégie anticapitaliste. Cela exclut aussi, à l’opposé, de se contenter d’une simple confrontation théorique.
Les marxistes révolutionnaires doivent viser à se coordonner pour élaborer leur stratégie, la mettre en débat et essayer d’en convaincre dans le NPA, la confronter aux autres positions mais aussi aux expériences faites dans le cadre du NPA.

Notes

[1Cela rejoint, au moins sous cet aspect, la critique qu’Olivier Nachtwey fait du concept de social-libéralisme qui «   se concentre trop sur l’orientation idéologique de la nouvelle social-démocratie et laisse dans l’ombre la représentation de classe  », Olivier Nachtwey, «  La crise de la représentation de classe en Allemagne et Die Linke  », ContreTemps, nouvelle série n°2, 2è trimestre 2009

[2Stathis Kouvélakis, «  France, une crise d’hégémonie prolongée  », ContreTemps, nouvelle série n°1, 1er trimestre 2009

[3Précisons quelques points pour éviter les faux débats. Parler de crise d’hégémonie ne revient pas à décrire une situation où cette hégémonie a disparu ou à dire que les relais de celle-ci ont été détruits. Mais certains de ces relais (notamment les médias, les institutions culturelles et éducatives) évoluent vers une plus grande subordination à la classe dirigeante, l’État évoluant vers des formes plus sécuritaires. En ce qui concerne les organisations de classe (partis, syndicats) leur affaiblissement ne signifie pas leur disparition.
Si la combinaison de la crise économique et du retour des luttes donnent une audience à la gauche radicale, cela n’a pas encore eu de traductions tranchées sur la structuration de la classe. Si Olivier Besancenot est désormais régulièrement cité en tête dans les sondages comme meilleur opposant à Sarkozy, le NPA reste numériquement beaucoup plus faible que le PS ou le PCF et électoralement très loin du PS. La combativité des travailleurs nourrit la critique des directions syndicales mais, en l’absence d’alternative, celles-ci continuent d’avoir la capacité de paralyser une généralisation des grèves comme l’a montré la séquence de ces derniers mois.

[4Une réflexion devrait être développée sur ce que changeait déjà le stalinisme pour l’application de cette stratégie du front unique à partir du moment où des deux partis qui se disputaient la direction du mouvement ouvrier, aucun n’était un parti révolutionnaire. Disons cependant que l’unité d’action des travailleurs continuait de se poser dans le cadre d’un mouvement ouvrier largement organisé. cf mon article : «  Redéfinir le front unique pour en faire une boussole  », Que Faire  ?, n°9, août/octobre 2008, consultable sur http://quefaire.lautre.net/articles/09frontunique.html

[5Daniel Bensaïd, Front unique et hégémonie, consultable sur http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article7177

[6Il est important par ailleurs d’insister sur la nature stratégique de la notion de front unique au détriment de toute réduction à une forme ou à un modèle. Car si la stratégie peut et doit se transcrire dans des formes d’organisation concrètes celles-ci ne sont pas figées, elles sont déterminées par les conditions dans lesquelles s’applique la stratégie. Elles peuvent prendre, dans une même période, des formes différentes. C’est d’autant plus le cas dans une période où aucun parti n’a une large légitimité sur la classe. Aujourd’hui en France certaines luttes exigent un travail en direction de la direction du PS selon des modalités qui ressemblent au modèle classique du front unique. Mais dans d’autres cas, s’adresser au PS n’est pas seulement une perte de temps c’est aussi le meilleur moyen de paralyser toute possibilité d’action. Par ailleurs une forme d’organisation du mouvement peut être adaptée dans une phase et ne plus l’être ensuite. La priorité mise sur l’unité syndicale peut être cruciale pour démarrer une grève tandis que l’insistance mise sur des assemblées et un comité de grève élu par celle-ci peut le devenir ensuite.

[7Ce que Chris Harman résume à essayer de trouver ce qui donne le potentiel «  à une force économique de se traduire en force politique avec la capacité de masse pour entraîner toutes les sections opprimées dans une tentative pour renverser une vieille structure politique  », dans «  Gramsci, the Prison Notebooks and philosophy  », International Socialism n°114.

[8Ce gauchisme a beau avoir un aspect spontané il n’en subit pas moins l’influence des théories «  autonomes  ». Panos Garganas a tout à fait raison de le souligner car cela signifie qu’un combat politique et théorique doit être mené contre ces courants. Par ailleurs l’influence de ces courants sera d’autant plus forte sur des sections importantes bien que minoritaires du mouvement que nous ne saurons pas élaborer une stratégie cohérente pour le NPA.

[9La tradition dans laquelle je me reconnais comme Callinicos, celle de l’International Socialist Tendancy a longtemps critiqué la tradition du trotskysme dit orthodoxe dont celle de la IVe Internationale pour sa conception formelle et ahistorique du programme de transition élaboré par Trotsky. Signe de la nouveauté de la période cette démarche doit être reprise et réactualisée. Il ne faudrait pas que les arguments de l’IST, valables hier selon moi, deviennent un obstacle pour la situation qui s’ouvre. Inversement il ne faudrait pas que le courant issu de la IVe Internationale rejette désormais la démarche transitoire au rang des «  leçons stratégiques dépassées  » et le trotskysme comme tradition du passé.

[10Donny Gluckstein, The Western soviets, Bookmarks, 1985


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    International Socialism, Revue mensuelle théorique du Socialist Worker Party.

  • lcr-lagauche.be

    Le site web de la LCR Belge contient de nombreux articles de théorie marxiste très intéressants.

  • marxists.org

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  • npa-formation.org

    Le site de la commission nationale formation du NPA.


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